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Propriété de Mandet Christophe |
Les réacteurs de première génération furent dans les années 1950 et 1960 les précurseurs des actuels réacteurs producteurs d’électricité, particulièrement aux USA, dans l'ancienne Union soviétique, en France et au Royaume-Uni. Le développement de l’usage civil de l’atome doit beaucoup au président américain Eisenhower qui, le 8 Décembre 1953, lors d’une adresse restée célèbre à l'Assemblée générale des Nations Unies, lança l’initiative «Atomes pour la paix», en réponse à l'escalade de la course aux armements nucléaires entre les États-Unis et l'Union soviétique. |
1951 : Experimental Breeder Reactor |
Les puissances de ces précurseurs paraissent modestes en regard de celles de leurs successeurs d’aujourd’hui. En 1951 aux USA, l’EBR-1 fournissait de quoi alimenter juste quatre ampoules électriques. En 1954 dans l'ancienne Union Soviétique, la puissance électrique de la première centrale nucléaire au monde productrice d'électricité d’Obninsk, baptisée "Atom Mirny " - atome pacifique - ne dépassait pas 5 Mégawatts (MWe). Ce réacteur, précurseur du tristement célèbre RBMK de Tchernobyl, était refroidi par de l’eau et modéré au graphite. Il fonctionnera jusqu’en 2002. L’année 1954, fut aussi celle du lancement du premier sous-marin à propulsion nucléaire du monde, l'USS Nautilus (un REP de 10 MWth ). |
1957 : inauguration du réacteur de Calder Hall |
D’autres réacteurs de première Génération étaient dérivés des réacteurs embarqués de sous-marins comme les précurseurs des réacteurs à eau légère, pressurisée (REP) ou bouillante (REB). L’emploi de l’eau légère demandait de l’uranium enrichi. Il y eut aux Etats-Unis le premier réacteur REP à eau légère pressurisée de Westinghouse (1957, Shippingport, 60 MWe) et celui à eau bouillante (REB) de General Electric (1959, Dresde). |
Réacteurs de génération II
1970-2009 : l’essor de l’énergie nucléaire |
Réacteurs à eau pressurisée et bouillante |
Environ 85 % de l’électricité d’origine nucléaire produite dans le monde provient de réacteurs dits de seconde génération, héritiers des prototypes des années 1950-1960. Ils constituent la grande majorité des quelques 439 unités déployées aujourd’hui et développaient en 2008 une puissance électrique totale de 372 GWe. Ces réacteurs sont répartis dans 30 pays (93 % de Génération II et 7 % de Génération I), accumulant au total une expérience de plus de 13600 années-réacteurs. |
Un pic de construction vers 1980 |
La France s’équipa à Tricastin près de Pierrelatte d’une grande usine d’enrichissement de l’uranium par diffusion gazeuse. Le président Georges Pompidou prit en octobre 1969 la décision d’abandonner la filière nationale des réacteurs graphite-gaz au profit de la filière américaine plus prometteuse des PWR à base d’uranium enrichi. La décision fut à l’époque critiquée par ceux qui pensaient que la France perdait son indépendance. Une nouvelle société Framatome construira les nouveaux réacteurs. Elle achètera la licence des réacteurs à eau pressurisé de la société Westinghouse qu’elle paiera plusieurs années avant de s’en libérer avec l’aide du CEA en 1982 pour développer une technologie purement française. |
France : un parc REP homogène |
Le combustible à l'uranium des réacteurs de génération II est enrichi de 3,5 à 5 % en isotope 235 fissile. L’enrichissement en uranium 235 offre l’avantage de pouvoir se contenter d’eau ordinaire pour ralentir les neutrons, ralentissement nécessaire pour la marche des réacteurs quand la proportion de matière fissible est faible. Le combustible sous forme de pastilles d’oxyde d’uranium UO2 est encapsulé à l’intérieur de longues gaines de zirconium, le métal transparent aux neutrons qui a remplacé l’acier inoxydable des débuts. Dans certains cas, une partie du combustible appelé MOX – pas plus d’un tiers – peut comporter environ 6 % de plutonium. |
Le Royaume-Uni a développé les AGR (advanced gas-cooled reactor), des réacteurs modérés au graphite et fonctionnant avec un uranium légèrement enrichi, suite des réacteurs MAGNOX. Le Canada a amélioré sa filière à uranium naturel CANDU, implantée également en Argentine, Chine, Inde, Roumanie et Corée. L’URSS a développé les RBMK avant l’accident de Tchernobyl et la filière VVER des réacteurs à eau pressurisée proche des REP. |
Reacteurs REB (BWR) |
Les réacteurs à eau bouillante ou REB (en anglais BWR, abréviation de Boiling Water Reactor) sont actuellement en fonctionnement aux Etats-Unis, au Japon, en Allemagne, Finlande, Russie, Suède, Suisse, ainsi que dans divers autres pays. Pour la production d’électricité, la filière vient en second après celle des réacteurs à eau sous pression (REP), bien avant les réacteurs CANDU et les RBMK. Elle représente environ le quart du parc mondial des réacteurs en exploitation. |
Un réacteur précurseur : le BWR de Humboldt Bay |
Cette filière à neutrons thermiques dont le modérateur est l'eau ordinaire, a été conçue aux Etats-Unis. La construction des réacteurs à eau bouillante est restée longtemps le domaine réservé du constructeur Général Electrics (GE) dont la première unité commerciale fut celle de Humboldt Bay, près de Eureka en Californie. La puissance des réacteurs BWR actuels est de 570 à 1300 MWe |
Schéma d’un réacteur à eau bouillante |
Il y a donc une barrière de moins entre la radioactivité du combustible et l’environnement et donc nécessité d'avoir un gainage du combustible particulièrement étanche. L’étanchéité des gaines, et plus loin des turbines, doit être étroitement surveillée. Si une perte d'étanchéité du gainage est constatée en service impliquant la présence potentielle de produits de fission dans la partie turbine du circuit, il faut isoler rapidement l'extraction de vapeur. |
Les barres de contrôle sont introduites depuis le dessous de la cuve du cœur du réacteur par l’intermédiaire d’une forte pression hydraulique, une particularité des REB. L'insertion des absorbants dans le cœur en cas d'arrêt d'urgence ne se fait donc pas par gravité. |
Réacteurs CANDU |
Laboratoires de Chalk River |
La filière CANDU est une filière développée depuis les années 1950 au Canada. Son origine remonte à l’accord signé le 19 avril 1943 au Québec fixant la collaboration nucléaire entre les Etats-Unis et la Grande-Bretagne durant la seconde guerre mondiale. Alors que le projet Manhattan bat son plein, les américains refusent de partager avec leur meilleur allié leurs recherches sur l’enrichissement de l’uranium et l’extraction du plutonium. Ils acceptent cependant au printemps 1944 la construction d’un grande pile à eau lourde qui serait le fruit d’une collaboration entre la Grande-Bretagne, les Etats-Unis et le Canada. La pile fut construite en deux ans à partir de 1945, dans un site magnifique et isolé, à Chalk River, au bord de la rivière Otawa. |
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Calandre et éléments combustible |
Rechargement en continu |
Les réacteurs CANDU sont des réacteurs à eau lourde utilisant comme combustible de l’uranium naturel. Le recours à l’uranium naturel rendait cette filière attractive à l’époque où de nombreux pays ne disposaient pas d’uranium enrichi. La difficulté était d’avoir de l’eau lourde. Tous les réacteurs canadiens appartiennent à la filière CANDU qui a été exportée notamment en Inde et au Pakistan. |
Une molécule d’eau lourde est une molécule d’eau dont chacun des protons des deux hydrogènes sont remplacés par un noyau de deutérium, constitué d’un proton et d’un neutron. L’eau lourde est, avec le graphite ultra-pur, le seul modérateur qui permette d’utiliser l’uranium naturel. Un réacteur utilisant un tel combustible pauvre en uranium-235 fissile ne peut fonctionner qu’avec des neutrons de basse énergie, dits thermiques. |
Les réacteurs CANDU utilisent l’eau lourde à la fois comme modérateur et fluide de refroidissement. |
Le combustible à l’uranium naturel est rechargé à pleine puissance en continu, une faculté permise par la subdivision du cœur en plusieurs centaines de tubes de pression. Ces tubes, composés de plusieurs éléments d’environ 20 kg et de 50 cm de long d’uranium naturel, sont immergés dans de l’eau lourde de refroidissement sous pression. Chacun de ces tubes est entouré d’un tube également rempli d’eau lourde, mais à basse pression et température, jouant le rôle de modérateur. |
Réacteurs RBMK
La filière des réacteurs de Tchernobyl |
La guerre froide et le rideau de fer ont conduit après 1947 au développement de filières séparées dans les pays occidentaux et en Union Soviétique. L’espionnage et les exploits des services secrets ont été loin de compenser le manque de contacts industriels ! |
force sont placés verticalement dans l'empilement de briques de graphite qui joue le rôle de modérateur. Au-dessus du réacteur, une machine de rechargement permet le déchargement et le chargement, en continu, du combustible dans les tubes de force. Lors de l'accident, les briques de graphite ont brûlé pendant 10 jours, prolongeant les rejets de radioactivité. |
À la fin de la seconde guerre mondiale, les américains avaient développés des réacteurs à Hanford pour produire le plutonium de leurs bombes atomiques. Ces réacteurs furent abandonnés en Occident pour la production d’électricité, mais poursuivis en Russie. Les Soviétiques développèrent ainsi la filière RBMK, des réacteurs à uranium enrichi, dont la conception découle des premières piles atomiques. La filière RBMK est celle devenue tragiquement célèbre lors de l’accident de Tchernobyl. |
Chaque tube de force renferme un assemblage combustible au dioxyde d'uranium autour duquel l'eau de refroidissement circule à une pression d'environ 70 atmosphères. L'eau joue le rôle de réfrigérant et fournit la vapeur directement utilisée pour actionner les turbines (il n’y a pas de générateur de vapeur). Le chargement et le déchargement du combustible se font en continu, sans qu’il soit besoin d’arrêter le réacteur. |
L’ensemble des caractéristiques du réacteur (eau bouillante, graphite comme modérateur, combustible légèrement enrichi, absorbants, etc …) confère à ce réacteur une instabilité à certains régimes de fonctionnement qu'il convient d'éviter, notamment aux faibles puissances. Le coefficient de température est positif (alors qu'il est négatif dans les réacteurs REP). Un coefficient de température positif signifie qu'une augmentation de température engendre une nouvelle augmentation de la température et ainsi de suite. La perturbation initiale se trouve ainsi amplifiée. Cet effet déstabilisant rend difficile le contrôle du réacteur. Pour le combattre, on joue sur les barres de contrôle. Depuis l'accident de 1986, les exploitants des réacteurs ont augmenté le nombre de barres de contrôle dans le cœur et amélioré la vitesse d'insertion de ces barres qui était trop lente. |
Centrale RBMK de Smolensk |
Schéma du cœur d'un réacteur |
Le cœur est contenu dans une cuve métallique étanche, revêtue intérieurement d'acier inoxydable. Il comporte des dispositifs de pilotage, et notamment des barres de contrôle en cadmium, ainsi que des dispositifs de sécurité. Cette enceinte constitue une seconde barrière de protection. |
Les éléments de combustibles contenant de l'uranium forment le cœur d'un réacteur à eau pressurisée (REP). L'eau s'échauffe au contact de la gaine des éléments et circule à une température élevée dans un circuit fermé : le circuit primaire. Celui-ci va chauffer l'eau contenue dans un autre circuit (le circuit secondaire) à travers des échangeurs de chaleur appelés générateurs de vapeur. Cette vapeur en se détendant fait tourner la turbine qui entraîne l'alternateur, lequel produit l'électricité. La vapeur sortie de la turbine est ensuite refroidie et transformée en eau dans le condenseur et renvoyée dans le générateur de vapeur. Le refroidissement du condenseur se réalise à l'aide de l'eau d'un troisième circuit. Des pompes font circuler l'eau dans ces divers circuits. Un pressuriseur maintient l'eau du circuit primaire sous haute pression et l'empêche de bouillir. Des barres de commande permettent de contrôler la réaction en chaîne. |
À la sortie de la cuve, la température de l'eau primaire est d'environ 300° C. Cette eau passe ensuite dans un échangeur de chaleur, où elle se refroidit en vaporisant l'eau d'un circuit secondaire. Dans le générateur de vapeur, l'eau secondaire baigne les tubes où circule l'eau primaire avant qu'elle ne retourne dans la cuve du réacteur. À la sortie du générateur, la pression de la vapeur secondaire est de 70 atmosphères. |
RNR et surgénérateurs |
Un certain nombre de réacteurs dits à neutrons rapides ou RNR ne nécessitent pas de ralentir les neutrons. Avec un combustible enrichi à 15 ou 20 % d'uranium-235 ou de plutonium, il n'est plus nécessaire de ralentir les neutrons comme dans les réacteurs industriels à eau préssurisée parexemple. L'intérêt des neutrons rapides est qu'ils sont les seuls capables d'extraire la totalité de l'énergie de fission contenue dans l'uranium de la croûte terrestre. |
PHENIX : un réacteur à neutrons rapides |
Les réacteurs à neutrons rapides utilisent principalement du plutonium comme combustible. Ils ne nécessitent pas de modérateur. |
Surgénérateur SUPERPHENIX à Creys-Malville |
Le seul réacteur à neutrons rapides ayant fourni de l'électricité à échelle industrielle est Superphenix. Il a été arrêté en 1997. Divers pays, dont la France, le Japon, la Russie notamment continuent des recherches sur cette filière dans le cadre des études sur les réacteurs de quatrième génération. |
En tant que brûleurs de déchets, les réacteurs à neutrons rapides devraient subir la concurrence des réacteurs hybrides, dont le principe a été proposé par Carlo Rubbia en 1993. Ces derniers, encore à l'étude, qui auraient les avantages des réacteurs à neutrons rapides pour la régénération du combustible, seraient dédiés à la destruction des actinides. Ils auraient la capacité de détruire le plutonium et leur fonctionnement serait sûr. |
Source infos laradioactivite.com |
Réacteurs embarqués |
Les principes des réacteurs à eau sous-pression utilisé en propulsion navale diffèrent a priori peu des réacteurs de la même filière utilisés pour la production d’électricité. Ceci tient à ce que les premiers réacteurs à eau sous-pression « électrogènes » sont des réacteurs de propulsion navale « à terre » dont la puissance a été accrue. Par contre, la finalité de l’application et l’environnement dans lequel il se trouve placé affectent profondément la conception et la technologie du réacteur de propulsion navale qui est lui embarqué. |
Chaufferie compacte |
Pourquoi embarquer un système aussi complexe qu’un réacteur nucléaire pour faire avancer un navire ? La réponse tient en deux mots : autonomie et oxygène. Contrairement aux propulseurs diesel ou diésel-éléctrique des sous-marins classiques qui nécessitaient des bouffées d’air frais et des remontées en surface, un réacteur nucléaire peut fonctionner des années avec le même cœur combustible. Et surtout il ne consomme pas d’oxygène, avantage essentiel pour un sous-marin. Il n’a pas besoin de remonter en surface pour recharger ses batteries avec le groupe diesel. |
Grand carénage d’un sous-marin nucléaire |
Réacteurs de Génération I |
Les réacteurs RBMK |
Fonctionnement des REP |
Le cœur du réacteur est la source d'énergie. Comparable au foyer d'une chaudière, il produit de la chaleur. Il est composé d'éléments de combustibles contenant de l'uranium enrichi à 3,5 % ou du MOX. |